Un livre rafraîchissant écrit par Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac jusque cet automne, très investie dans les mouvements sociaux depuis les années 2000 et qui a été à de nombreuses reprises une actrice dans ces luttes, leurs convergences et débats .
Elle y dresse une sorte de panorama sur ces mouvements depuis les années 2000 avec leurs forces, leurs faiblesses, leurs débats ;
Il en ressort un “optimisme de la volonté” – elle détaille les convergences nouvelles même si partielles apparues ces derniers temps ( entre une partie du mouvement syndical et une partie du mouvement écologiste à l’occasion de “plus jamais ça” mais aussi de la lutte autour du plan de licenciements à la raffinerie Total de Grandpuits ) entre ces mouvements et celui des banlieues sur la question de la défense des libertés démocratiques ( contre la loi sécurité globale); elle n’hésite pas à aborder aussi la difficile question des approches différentes du rapport à la violence ( cortège de tête, gilets jaunes, …) parmi celles et ceux qui se mobilisent. Cette analyse détaillée qui visite des mouvements depuis 2000, aussi variés que le mouvement féministe, les Gilets Jaunes, le mouvement antiraciste, les luttes autour du climat, les mouvements plus classiques contre la loi travail, contre le réforme des retraites, le mouvement altermondialiste pointe leurs forces ( jeunesse, inventivité, massivité pour certains) et leurs faiblesses (très peu de victoires sur lesquelles s’appuyer, difficultés à converger) redonne espoir à un moment politique où le sentiment de montée inéluctable de l’extrême droite est très fort, voir paralysant dans certains cas.
Elle analyse aussi les relations entre mouvements politiques classiques et mouvements sociaux ; sa thèse étant pas l’un sans l’autre ni l’autre sans l’un; en tous cas, elle bataille contre celles et ceux qui chercheraient soit à dire on peut se passer des politiques, et celles et ceux pour qui il devrait y avoir subordination. D’où sa proposition de bloc arc en ciel.
Elle aborde aussi la difficile question de l’unité à gauche, de façon moins consensuelle puisque celle-ci d’après elle ne peut se faire au sommet sur la base d’un moins disant programmatique mais doit allier radicalité et inclusivité comme condition pour offrir une véritable alternative au capitalisme. Elle prend position dans ces confrontations à gauche sur plusieurs points ( participation à la manif des policiers d’extrême droite, nucléaire, lutte contre le racisme, les discriminations) et indique clairement ses conceptions radicales et unitaires.
Elle préside dorénavant le “Parlement de l’Union Populaire” de la campagne de Jean-Luc Mélenchon; elle le fait avec exigence et sans complaisance avec le fonctionnement de la FI : on peut en effet lire de façon explicite une critique du fonctionnement gazeux : dans le texte – “fonctionnement gazeux où sous couvert de démocratie, un petit nombre de chefs non élus décident de tout en l’absence de délibération collective”. A un autre moment, elle critique aussi le fait que ce fonctionnement renforce le rôle du porte parole et ses proches!
On peut regretter, que même si c’est abordé, les aspects de dégradation de la situation politique soient un peu trop édulcorés ( montée de l’extrême droite, du racisme et de l’antisémitisme, la question du complotisme, les effets des échecs des mouvements sociaux pour lesquels les victoires sont l’exception, …). Elle développe l’idée que la trajectoire vers la droite est essentiellement électorale, mais que dans les profondeurs de la société, de la jeunesse, les thèses fascisantes sont beaucoup moins reprises.
La lecture de cet ouvrage fait du bien: un discours et un livre qui redonnent un peu confiance dans les potentialités des combats des nouvelles générations
Bernard G.
Aux Editions La Découverte, 13 euros