Gustavo Petro, 1er Président de gauche de Colombie

Plus de deux siècles de bipartisme entre libéraux et conservateurs – tous deux représentant.es de la même oligarchie sanglante – se sont écoulés avant que la gauche arrive au gouvernement.

En Colombie, la classe dominante, n’hésitant sur aucun moyen répressif, est très violente et a procédé à une élimination systématique pour faire disparaître l’opposition politique et les mouvements sociaux afin de contrôler le pouvoir et de servir ses propres intérêts capitalistes et ceux des Etats-Unis.

Il faut donc saluer le courage du peuple colombien qui a fait élire Gustavo PETRO dans un climat de fortes tensions, de menaces, détentions arbitraires, d’assassinats et de suspicions de fraude de la part du gouvernement. Sans oublier la manipulation de l’information par les grands médias.

Le dimanche 19 juin 2022 Gustavo PETRO a été élu avec 50.47% des voix au second tour, face au candidat soutenu par la droite et l’extrême droite sortante. Gustavo Petro ancien guérillero du mouvement M-19 dans les années 1970, a subi la prison et la torture. Le M-19 a déposé officiellement les armes le 8 mars 1990 et signé un accord de paix la même année. Petro, économiste de formation, a été élu à l’Assemblée nationale et au Sénat à plusieurs reprises depuis 1998. C’est lui qui a mené une lutte contre la corruption, les trafiquants de drogue et les paramilitaires à l’intérieur de l’appareil d’Etat. Il a également été maire de Bogota de 2012 à 2015.

La coalition qui a permis à Petro d’être élu rassemble la gauche et les mouvements sociaux : écologistes, syndicats, organisations d’amérindien.nes et d’afro-colombien.nes notamment, dont est issue sa suppléante et désormais vice-présidente, Francia MARQUEZ.
Le programme politique de cette coalition (« Pacto Historico ») se veut antilibéral, de défense de l’environnement, de lutte contre la pauvreté, de transition écologique pour sortir de l’exploitation du pétrole et du charbon. Il prône aussi, de toute urgence, la défense de la vie et des activités des militant.es politiques de gauche et des militant.es associatifs ainsi que des défenseur.es des droits humains . (87 assassinats en 2022 plus 21 assassinats des anciens membres des FARC, signataires de l’accord de Paix).

Le résultat électoral arrive moins d’un an après la plus grande mobilisation sociale contre le gouvernement d’extrême droite de Ivàn Duque ; cette protestation sociale a duré plus de trois mois et a été marquée par une répression sanglante qui a fait de nombreuses victimes.

Les défis auxquels le gouvernement de la gauche colombienne se trouve confrontés sont principalement :
⁃ Gouverner sans la majorité, ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat.
⁃ Trouver une solution au narcotrafic (la Colombie produit plus 85% de la cocaïne consommée dans le monde). Ce trafic est la source de corruption et de financement des groupes armés d’extrême droite (paramilitaires) qui contrôlent la production de la cocaïne.
⁃ Trouver un accord de paix avec la guérilla encore active de l’Armée de libération nationale (ELN).
⁃ Sortir de la pauvreté plus de 50 % de la population colombienne qui en souffre.
⁃ Assurer la sécurité alimentaire pour environ 7.2 millions de personnes qui selon la F.A.O. sont sous-alimentées et mangent seulement une ou deux fois par jour.
⁃ Rétablir les relations diplomatiques et économiques avec le Venezuela, pays avec lequel la Colombie partage la plus longue frontière et où sont présents, côté colombien, des groupes armés d’extrême-droite (paramilitaires) et résoudre la crise migratoire entre les deux pays.
⁃ Faire respecter la souveraineté de son territoire – sept bases militaires sont sous le contrôle de l’armée nord-américaine.
⁃ Encadrer les relations avec l’armée colombienne, qui est formée et endoctrinée par la propagande anticommuniste israélienne et nord-américaine.
⁃ Dynamiser une économie dopée par les revenues du trafic de la cocaïne, création d’une industrie propre, avec la génération d’emplois durables dans un pays avec un chômage de 13% et où 47% de la population économiquement active travaille uniquement dans le « secteur informel »
⁃ Mise en œuvre effective des accords de paix signés en 2016 à la Havane, des accords d’Etat, non respectés ni appliqués par le gouvernement sortant.

L’élection de Gustavo PETRO va changer le rapport de forces avec les Etats-Unis.
De nouvelles gauches sont arrivées au pouvoir en Argentine, au Pérou, au Honduras, au Chili et il y a la très probable élection de Lula au Brésil en octobre 2022. Elles réinventent la social-démocratie latino-américaine dans leur contexte propre. Elles n’ont pas de programme anticapitaliste ou révolutionnaire mais sont favorables à de profonds changements même si à ce stade ceux-ci sont loin d’être réalisés. Elles ont des visions de la politique étrangère à l’opposé d’un Maduro ou encore plus d’un Ortega, que le Chilien Boric dénonce. Ces changements peuvent contribuer à desserrer l’étau contre Cuba.

Pour que les réformes promises par cette gauche en Colombie réussissent, il faudra de grandes mobilisations et aussi toute la solidarité des peuples.
Nous suivrons avec attention les déclarations, communiqués et appels des mouvements sociaux colombiens confrontés aux nouvelles menaces de l’oligarchie contre la volonté de changement dont est porteuse cette victoire populaire.

Venceremos !